VU D'AILLEURS
Narco-économie dans le Triangle d’or
La production d’opium atteint des niveaux sans précédent en Birmanie qui reste avec le Laos l’un des pays d’Asie du sud-est le plus touché par le trafic d’héroïne d’après un rapport récent de l’United nations office on drugs and crime. Outre ses effets sur la santé des populations et son cortège de violences, le trafic d’héroïne impacte le développement des villes et la mise en place des politiques de soutien aux régions pauvres, freinant l’intégration régionale, moyen pourtant essentiel pour diversifier la base économique du pays.
Source : "Opium production in the Golden Triangle continues at high levels, threatening regional integration", UN news center, 8 décembre
>> Consulter l’enquête Southeast Asia Opium Survey 2014 – Myanmar and Lao PDR
La méthamphétamine dans les pas de l’opium en Iran
L’Iran voit le nombre d’usagers de méthamphétamines augmenter considérablement à mesure des mutations importantes que connaît le pays. En termes sociodémographiques, les usagers sont jeunes, plus présents dans les villes, au sein des classes moyennes. Les méthamphétamines y sont appréciées pour leurs effets stimulants ou coupe-faim. Le pays qui se distingue par une politique des drogues parmi les plus répressives, est aussi un modèle de prise en charge des conduites addictives avec un haut niveau d’efficacité des traitements. Pour l’heure, compte tenu des risques et effets délétères rapides associés à la consommation de méthamphétamines, les cliniciens en appellent à une sensibilisation des familles quant aux dangers de cette substance et encouragent les hospitalisations en centres de réhabilitation.
Source : Babak Dehghanpisheh, "Methamphetamine use soars in Iran as lifestyles speed up", Reuters, Mon, Dec 08 00:32 AM EST
PREVENTION DES RISQUES
Snus et e-cigarette, outils de réduction des risques liés au tabagisme ?
Une étude s’inscrivant dans la controverse qui entoure la cigarette électronique comme dispositif de réduction des risques ou simple produit du tabac, a voulu attirer l’attention sur l’évolution du tabagisme consécutive à l’introduction du « snus » ou tabac sans fumée à faible teneur en nitrosamines, en Norvège. L’étude s’est intéressée à l’impact de l’introduction d’alternatives nicotiniques non pharmacologiques sur la consommation de cigarettes classiques, évaluant la prévalence du tabagisme sur un échantillon de 19 269 individus ayant fumé du tabac sur une durée de 28 ans, entre 1985 et 2013. Parmi les principaux résultats : chez les jeunes hommes adultes notamment, la prévalence du tabagisme serait passée de 51 % en 1985 à 21 % en 2013, les auteurs suggérant une association de type causale entre l’introduction du snus sur le marché et l’augmentation des sevrages tabagiques et/ou de réduction des consommations de cigarettes classiques, estimant que cette expérience positive devrait encourager l’estimation, à leur juste valeur, des effets sanitaires potentiels de l’e-cigarette.
Source : Ingeborg Lund, Karl Erik Lund, "How Has the availability of snus influenced cigarette smoking in Norway?", International journal of environmental research and public health, 2014, 11(11), 11705-11717
doi:10.3390/ijerph111111705
Abaissement du seuil d’alcoolémie au volant en Ecosse
Une nouvelle loi s’impose avec force en Ecosse abaissant le seuil maximum d’alcoolémie au volant de 50 mg pour 100 ml de sang (contre 80 mg/100 ml de sang auparavant), seuil le plus bas en vigueur en Grande-Bretagne. Mesure législative à forte teneur symbolique, elle entend sensibiliser tout un chacun quant aux risques associés à la consommation d’alcool avant de prendre le volant, y compris pour des doses qui peuvent sembler modérées. Présentée comme passible de réduire le taux d’accidents graves et de mortalité sur les routes, elle crée déjà des émules : l’Irlande du Nord annonce vouloir s’en inspirer, à court terme.
Source : "Scotland cuts drink-drive alcohol limit", BBC News, 5 décembre 2014
E-cigarette et aide au sevrage tabagique
Une revue systématique de la littérature publiée dans la revue Circulation de l’American Heart Association dans le cadre de leurs sessions scientifiques, ayant inclus deux essais randomisés contrôlés, deux études de cohorte, et deux études transversales pour un échantillon total de 7551 participants dont 1242 pour lesquels les données de sevrage tabagique ont pu être exploitées, vient conforter l’hypothèse de l’intérêt de l’e-cigarette, dès lors qu’elle est enrichie en nicotine, dans une perspective de sevrage tabagique. Une réserve cependant : un possible « effet de genre » comme une variable de cette efficacité n’a pas pu être établi pour l’instant.
Source : Muhammad A Rahman; Nicholas R Hann; Andrew M Wilson; George Mnatzaganian; Linda Worrall-Carter, "Electronic cigarettes are effective for smoking cessation: evidence from a systematic review and meta-analysis", Circulation. 2014; 130: A14945
RECHERCHE CLINIQUE
Signature métabolique de l’hépatite alcoolique sévère VS cirrhose alcoolique
Une étude prospective contrôlée préliminaire publiée dans PloS One apporte des éléments nouveaux pour la compréhension de la pathogénèse de l’hépatite alcoolique aiguë en identifiant, à partir du profilage métabolique sanguin de 25 patients HAA et 25 patients atteints de cirrhose alcoolique, des changements de métabolites marqueurs de l’inflammation différentiels selon ces deux pathologies, avec l’altération de 234 substances biochimiques pour l’HAA, une association entre HAA et lipolyse accrue, dysfonctionnement mitochondrial diminuant l'oxydation des graisses, sur-activation de l’oxydation des acides gras oméga, et au niveau de l’homéostasie énergétique : catabolisme accru des peptides, altération du cycle d’activité des acides tricarboxyliques. Enfin l’étude se distingue par le repérage d’un panel important de biomarqueurs métaboliques chez les personnes ayant survécu à une HAA dans la perspective de nouvelles approches d’aide au pronostic.
Source : Rachakonda V, Gabbert C, Raina A, Bell LN, Cooper S, Malik S, Behari J., "Serum metabolomic profiling in acute alcoholic hepatitis identifies multiple dysregulated pathways.", PLoS One, 2014 Dec 2;9(12):e113860. doi: 10.1371/journal.pone.0113860. eCollection 2014.
PHARMACOLOGIE
La kétamine suscite l’engouement des investisseurs… et des cliniques
Le New York Times relaie une étude préliminaires présentée dans le cadre d’un congrès américain de neuro-psycho-pharmacologie en Arizona par un laboratoire dont l’effort de recherche se porte actuellement sur les preuves de l’innocuité de la kétamine au regard d’autres substances pharmacologiques dans le traitement de la dépression. Le laboratoire a investi 80 000 de dollars dans ces recherches et s’apprête à lancer un essai clinique en phase 3 afin d’obtenir pour le GLYX-13 à l’horizon 2019 une autorisation de mise sur le marché par la Food and drug administration. Les industries Johnson & Johnson ou Cerecor misent également sur la kétamine et certains praticiens et patients ont pris les devants : la kétamine étant autorisée comme substance anesthésiante, sa prescription est tolérée pour traiter la dépression, moyennant de 300 à 1000 dollars pour un traitement. La kétamine suscite de plus en plus d’intérêt en termes thérapeutiques et aussi commerciaux mais cet emballement n’est pas sans soulever cependant quelques réserves chez certains professionnels du soin s’appuyant sur des considérations éthiques, les personnes traitées pour des symptômes dépressifs étant le plus souvent en situation de grande vulnérabilité.
Sources :
* Andrew Pollack, "Special K, a hallucinogen, raises hopes and concerns as a treatment for depression", New York Times, 9 décembre 2014
* A propos de la prescription de kétamine hors indication : "Proceed with caution: off-label ketamine treatment for major depressive disorder", Current psychiatry reports, décembre 2014
MODES DE PRISE EN CHARGE
Le statut tabagique peut être problématique dans le cadre de la prise en charge de l’alcoolo-dépendance
La consommation de tabac peut s’avérer préjudiciable dans le cadre d’un traitement de l’alcoolo-dépendance. C’est ce que tend à montrer une étude publiée dans Substance use and misuse menée auprès de 21 000 individus, hommes et femmes en traitement dans le cadre de consultations externes à travers les Etats-Unis. L’étude qui a choisi d’intégrer dans son modèle d’analyse mixte l’existence de certaines complexités cliniques à l’admission telles que inactivité, démêlés avec la justice, polyconsommations avec mésusage, troubles de la santé mentale, a mis en évidence d’une part une association significative entre le statut de fumeur et ces cinq complexités cliniques et d’autre part, une observance moindre des patients fumeurs, avec des traitements de plus courte durée, une plus faible propension à mener le traitement jusqu’à son terme et à remplir les objectifs fixés dans ce cadre thérapeutique chez les patients fumeurs au regard des patients non-fumeurs, avec une association particulièrement forte pour les femmes fumeuses.
Source : Kimberly S. Walitzer, Ronda L. Dearing, Christopher Barrick, Kathleen Shyhalla, "Tobacco smoking among male and female alcohol treatment-seekers: clinical complexities, treatment length of stay, and goal achievement", Substance Use & Misuse Janvier 2015, Vol. 50, No. 2: 166–173.
L’hospitalisation en centre d’addictologie bénéficie aux jeunes adultes dépendants aux opioïdes
Une hospitalisation en centre d’addictologie (HA), à visée de sevrage, serait-elle efficace pour traiter durablement les troubles de l’usage d’opioïdes des jeunes adultes ? C’est ce que suggère une étude réalisée sur un échantillon de 292 individus âgés de 18 à 24 ans répartis en sous-groupes sur des critères de dépendance aux opioïdes (25 %), trouble du mésusage d’opioïdes (20 %) et non-usage d’opioïdes (55 %). Si ce mode de prise en charge semble profitable aux jeunes adultes dépendants et à ceux présentant des troubles du mésusage, notamment en termes de taux d’abstinence durant le traitement, les patients dépendants témoignaient quant à eux d’une réduction plus sensible des symptômes psychiatriques, plus de jours d’abstinence et une réduction des polyconsommations associées dont l’usage de cannabis et d’alcool. Enfin, chez les patients dépendants, le maintien de l’abstinence sur un an s’élevait à 29% contre 17 % pour des soins en ambulatoires (SA), d’après les données recueillies par les auteurs dans le cadre d’une autre étude tandis qu’à 6 mois, les taux d’abstinence pour les deux modes de prise en charge étaient quasi équivalents (HA : 42,5 % et SA : 38 %). ("Emerging adult age status predicts poor buprenorphine treatment retention." Journal of substance treatment, 47, 202-2012)
Source : Schuman-Olivier Z, Claire Greene M, Bergman BG, Kelly JF., "Is residential treatment effective for opioid use disorders? A longitudinal comparison of treatment outcomes among opioid dependent, opioid misusing, and non-opioid using emerging adults with substance use disorder.", Drug Alcohol Depend. 2014 Nov 1;144:178-85. doi: 10.1016/j.drugalcdep.2014.09.009.
DROGUES ET SOCIETE
L’indigence n’est pas un crime
Une loi en vigueur en Floride, déjà condamnée à plusieurs reprises comme anticonstitutionnelle, a été une nouvelle fois invalidée par une cour d’appel fédérale. Cette loi conçue selon ses défenseurs comme destinée à limiter les abus, autorise que soient effectués des tests de repérage de consommation de drogues auprès des personnes sollicitant une aide sociale pour leurs familles (« temporary assistance for needy families », et ce indifféremment, qu’un usage de drogues soit soupçonné ou non. Les associations américaines de défense des citoyens dont l’American Civil Liberties Union en Floride, en croisade contre les criminalisations forcenées, se réjouissent de cette décision de justice.
Source : Lizette Alvarez, "Court strikes down drug test for Florida welfare applicants", New York Times, 3 décembre 2014
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