PREVENTION DES RISQUES
Informer sur la teneur en calories des boissons alcoolisées pour prévenir l’obésité
A partir d’une enquête pilote menée en Grande-Bretagne ayant permis de définir d’une part le peu de connaissances qu’ont les consommateurs de la valeur énergétique des boissons alcoolisées et d’autre part leur intérêt pour ces données, la Royal Society for Public Health s’est prononcée en faveur d’un étiquetage indiquant à la fois les unités d’alcool (nombre de verres standard) par boisson et leur teneur en calories. L’association entre consommation d’alcool et obésité ne faisant plus question, il lui a semblé plus que nécessaire de déployer de nouveaux outils de prévention pour que le grand public soit sensibilisé à l’apport calorique des boissons alcoolisées et puisse, le cas échéant, à partir de ces éléments, ajuster ses comportements de consommations.
Source : "Put calorie labels on beer, wine and spirits, say public health experts Alcoholic drinks are fuelling obesity epidemic and most have no idea how many calories their drinks contain", The Guardian, 31 octobre 2014
Un dispositif d’urgence innovant pour réduire la mortalité liée aux overdoses d’opioïdes
Le British Medical Journal, dans un éditorial récent, donne un écho favorable aux recommandations de l’OMS en faveur d’une extension de la distribution de naloxone aux usagers d’héroïne et à leurs proches afin de faciliter les interventions d’urgence, et en cela réduire le délai d’administration et la mortalité ; en effet dans le monde 69 000 personnes décèdent chaque année des suites d’une overdose d’héroïne. Ces recommandations s’adressent aux soignants et aux non-soignants et entendent prévenir le risque d’overdose pour tout usager, qu’il participe ou non à un programme de prise en charge et d’accompagnement. En Ecosse, la mise en place depuis 3 ans d’un programme de délivrance de naloxone, a produit des résultats prometteurs : le taux de décès par overdose d’opioïdes chez les anciens détenus tout juste libérés, population considérée comme particulièrement à risque, a baissé de façon sensible, passant de 9,8 % entre 2006 et 2010 à 6,3 % entre 2011 et 2013. Si les doses à administrer ne font pas encore consensus et si les modes d’administration moins invasifs que l’injection demeurent à l’état d’expérimentations, ces travaux en cours bien que cruciaux ne doivent pas, selon les auteurs, différer l’application et la généralisation de ces recommandations.
Source : John Strang, Sheila M Bird, Paul Dietze, Gilberto Gerra, A Thomas McLellan, "Take-home emergency naloxone to prevent deaths from heroin overdose", BMJ, 4 novembre 2014
doi: http://dx.doi.org/10.1136/bmj.g6580
>> Consulter les recommandations de l’OMS
EPIDEMIOLOGIE
Effets à long terme de l’usage de cannabis sur le cerveau
Au regard de données de la littérature jugées inconsistantes quant aux effets à long terme du cannabis sur le cerveau, une étude contrôlée réalisée auprès de 48 sujets usagers de marijuana et 62 sujets contrôle est venue caractériser, par IRM structurelle, les altérations cérébrales associées à l’usage chronique de marijuana. A l’aune des résultats révélés par anisotropie fractale montrant, chez les usagers chroniques de marijuana, un volume moins important du gyrus orbito-frontal bilatéral, une connectivité fonctionnelle plus dense au sein du réseau du cortex cortico-frontal et enfin une connectivité structurelle elle aussi plus importante dans la région du forceps frontal – altérations neuronales modulées par l’âge d’initiation et la durée de l’usage de cannabis – les auteurs formulent l’hypothèse de l’existence d’un mécanisme compensatoire neuro-adaptatif par lequel cette connectivité accrue vient répondre à la perte de volume de matière grise dans le gyrus orbito-frontal bilatéral.
Source : "Long-term effects of marijuana use on the brain", PNAS, 13 octobre 2014
Auteurs : Francesca M. Filbey,1, Sina Aslan, Vince D. Calhoun, Jeffrey S. Spence, Eswar Damaraju, Arvind Caprihan, Judith Segall
Alcoolodépendance et écosystème intestinal
Une étude parue dans PNAS a évalué si et dans quelle mesure des modifications de la perméabilité intestinale seraient associées à un déséquilibre de la flore intestinale auprès d’un échantillon d’individus en situation d’alcoolodépendance. Ceci apporte de nouveaux éléments quant à l’existence d’un lien entre altération des fonctions de l’intestin, symptômes psychologiques de l’alcooldépendance et syndrome de sevrage consécutif à un programme de désintoxication, et ouvre ainsi une piste peu investie encore dans le traitement et la prise en charge de l’alcoolodépendance.
Source : "Intestinal permeability, gut-bacterial dysbiosis, and behavioral markers of alcohol-dependence severity", Proceedings of the National Academy of Sciences (USA)
doi: 10.1073/pnas.1415174111
Auteurs : Sophie Leclercq, Sébastien Matamoros, Patrice D. Canib, Audrey M. Neyrinck, François Jamar, Peter Stärkel, Karen Windey, Valentina Tremaroli, Fredrik Bäckhed Kristin Verbekef, Philippe de Timary, Nathalie M. Delzenne
RECHERCHE FONDAMENTALE
Des modifications épigénétiques pour contrôler les comportements liés aux addictions et à la dépression
Une nouvelle étude réalisée sur des modèles de rongeurs à partir d’un remodelage de la chromatine au niveau du noyau accumbens a permis de déterminer l'importance du gène fosB, déjà identifié pour son rôle dans la physiopathologie des addictions et la dépression, dans le déclenchement de la réponse transcriptionnelle et comportementale à une exposition au stress et à la drogue, montrant comment, à partir de modifications post-traductionnelles (méthylation et acétylation), la régulation de l’expression de ce gène peut à elle seule pondérer, chez la souris, la réponse au stress et la propension à développer une addiction à la cocaïne.
Source : "Locus-specific epigenetic remodeling controls addiction- and depression-related behaviors", Nature neuroscience, 27 octobre 2014
Auteurs : Elizabeth A Heller, Hannah M Cates, Catherine J Peña, Haosheng Sun, Ningyi Shao Jian Feng, Sam A Golden, James P Herman, Jessica J Walsh, Michelle Mazei-Robison, Deveroux Ferguson, Scott Knight, Mark A Gerber, Christian Nievera, Ming-Hu Han, Scott J Russo, Carol S Tamminga, Rachael L Neve, Li Shen, H Steve Zhang, Feng Zhang & Eric J Nestler
>> Consulter le communiqué de presse de l’université à l’origine de ces travaux : "New DNA regulatory technique modifies the environment around a single gene to control gene expression and behavioral consequences"
Thérapie génétique pour le traitement de l’addiction aux méthamphétamines
Un communiqué de presse de l’American Association of Pharmaceutical Scientists (AAPS) fait état des travaux sans précédent d’une équipe de l’université de l’Arkansas à l’origine du développement d’un nouveau traitement de l’addiction aux méthamphétamines (METH). Ces travaux ont consisté en l’administration à des souris de particules de virus adéno-associés (AVV) capables de délivrer des gènes impliqués dans la production d’anticorps à haute affinité contre la METH. En effet, après l’injection, ces souris présentaient un taux de concentration plus élevé en METH dans le sang dans le temps suggérant un pouvoir inhibiteur de l’anticorps rendant la METH incapable de se fixer à ses récepteurs et de produire ses effets. Ces travaux ont été présentés le 4 novembre dernier dans le cadre de leur congrès annuel à San Diego.
Source : "Long-acting anti-methamphetamine antibody demonstrates protective benefits for meth addiction treatment", Communiqué de presse de l’American association of pharmaceutical scientists (AAPS)
CANNABIS ET SOCIETE
Into the wild (weed)
Une série d’articles parus le 29 octobre dernier dans le New York Times revient sur les lendemains de la dépénalisation de l’usage récréatif du cannabis en vigueur dans l’Etat du Colorado et donne la parole - non sans humour et dérision parfois - aux parents, aux scientifiques et au personnel éducatif pour lesquels cette nouvelle approche du cannabis n’est pas sans impact sur l’image que la jeune génération s’en fait, notamment quant à sa perception des risques potentiels liés à son usage. Evolution d’ampleur, la légalisation de l’usage récréatif du cannabis n’est pas sans danger et sa banalisation tend à rendre difficile la prévention auprès des jeunes : tandis que les équipes de recherche s’inquiètent de taux variables de THC selon les produits et des effets d’une exposition chronique sur le long terme, les parents et professeurs quant à eux, même s’ils sont nombreux à soutenir cette avancée législative, se voient dans l’obligation de déployer des trésors de créativité pour rouvrir le dialogue et appeler à la vigilance des jeunes gens qui voient dans le cannabis - surtout dans ces régions de montagnes luxuriantes - la licence, l’aventure et la nature.
Sources :
* Julie Scelfo, "Just Say No, Yes or Maybe", New York Times, 29 octobre 2014
* Abigail Sullivan Moore, Julie Turkewitz, "Legally High at a Colorado Campus", New York Times, 29 octobre 2014
* Abigail Sullivan Moore, "This Is Your Brain on Drugs", New York Times, 29 octobre 2014
Le marché du cannabis à la recherche de son leader
Un article paru dans The Economist s’attarde sur les caractéristiques du marché du cannabis aux Etats-Unis, marché aujourd’hui porté par des structures d’envergure modeste qui s’épanouissent dans des services toujours plus inventifs et variés, et ce sans qu’ait pu s’imposer un acteur leader sur le marché. Du fait d’exigences réglementaires qui empêchent la spécialisation des entreprises dans le marché du cannabis, cette industrie peine en effet à se doter de groupes leader, situation jugée temporaire qui devrait se transformer considérablement avec la levée probable de l’interdiction fédérale qui ouvrira la voie, comme la fin de la prohibition en son temps, à des géants de l’industrie.
Source : "The Marlboro of marijuana", The Economist, 8 novembre 2014
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