POLITIQUE DES DROGUES
Un appel à la clémence historique
Le New York Times donne écho à la vaste entreprise américaine de révision des peines infligées aux prisonniers incarcérés pour des délits liés à la vente ou à l’usage de drogues. Pointées du doigt par les conservateurs, les libéraux et les libertaires, les condamnations excessives sont aujourd’hui dénoncées pour leur démesure, leur caractère discriminant et leur coût social.
Lors de son premier mandat, Barack Obama avait déjà modifié une loi vers plus d’ « équité » pour que les peines de prison appliquées au crack soient alignées sur celles de la cocaïne. Pour l’heure, le nombre de remises de peine consenties devraient atteindre les 80 dans les semaines qui viennent, sur un total de 30 000 détenus pour lesquels une demande de commutation de peine a été déposée.
Source : Peter Baker, "Obama plans broader use of clemency to free nonviolent drug offenders", The New York Times, 3 juillet 2015
VU D'AILLEURS
Les soins palliatifs mis à mal en Russie
En Russie, faute d’une approche coordonnée et dé-diabolisée de la prescription d’opiacés, beaucoup de patients décèdent privés d’un traitement efficace pour le soulagement de la douleur. Une vague de suicides, pour s’être vus refuser un traitement palliatif, avait généré un sursaut législatif et le droit des patients à bénéficier d’un traitement de la douleur est aujourd’hui inscrit dans la loi. Rien ne dit cependant que ce droit est effectif dans les faits. Outre le coût prohibitif de ces traitements, la politique des drogues, répressive, l’iatrogénie et les détournements associés à l’usage de narcotiques entretiennent la peur des praticiens qui préfèrent ne pas prescrire plutôt qu’encourir poursuites et sanctions pénales.
Source : Fiona Clark, "Russia's war on drugs leaves patients without pain relief", DOI: http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(15)61264-8
PREVENTION DES RISQUES
Dis-moi ce que tu as, je te dirai si c’est vrai
Lors du prochain festival de musique Evolve en Nouvelle-Ecosse, province située sur la côte atlantique du Canada, des kits de testing gratuits seront mis à la disposition des festivaliers qui souhaiteraient en savoir plus sur la composition des produits (LSD, MDMA et speed) qu’ils s’apprêtent à consommer. Les organisateurs entendent promouvoir une démarche pragmatique de réduction des risques. La restitution des résultats sera factuelle, non assortie de recommandations. Enfin, les résultats de cette expérience seront communiqués auprès des autres organisateurs de festivals pour encourager le développement de la RdR in situ.
Source : "Evolve Festival to offer free testing of concertgoers' drugs", CBC News, 6 juillet 2015
Cannabis et polyconsommations chez les jeunes adultes
Pour quels motifs les jeunes adultes consomment-ils du cannabis et en quoi ces motifs permettent-ils de mieux envisager les consommations de drogues associées ? C’est l’objet d’une enquête publiée dans l’American journal of drug and alcohol abuse à partir de l’analyse transversale des données issues de 12 cohortes d’étudiants (n= 6481). L’étude révèle notamment que l’ « ennui » (« boredom ») évoqué chez près d’un tiers de l’échantillon (31,3%), serait associé à un taux de consommation rapporté de cocaïne et d’hallucinogènes plus important tandis que le recours au cannabis pour maximiser les effets des autres drogues (11%) serait quant à lui fortement associé à un sur-risque de consommation des 8 drogues illicites incluses dans l’enquête (cocaïne, crack, héroïne, LSD, autres hallucinogènes, stimulants type amphétamines, anxiolyiques / tranquilisant, narcotiques (autres que l’héroïne). La quête de spiritualité dans l’introspection (« insight and understanding ») serait quant à elle positivement associée à une consommation concomitante de substances hallucinogènes. Enfin, autre donnée significative, l’expérimentation comme motif de consommation serait associée à un taux de consommation rapporté d’autres drogues moins important, à rebours de l’opinion communément partagée qui voit dans le cannabis la porte d’entrée vers les « drogues dures ».
Source : Joseph J. Palamar, Marybec Griffin-Tomas, and Dimitra Kamboukos, "Reasons for recent marijuana use in relation to use of other illicit drugs among high school seniors in the United States", Informa healthcare, 26 juin 2015. (doi:10.3109/00952990.2015.1045977)
RECHERCHE FONDAMENTALE
Neurobiologie des effets antagonistes du THC
La classe des récepteurs sérotoninergiques 5-HT 2A est au cœur de l’expression différenciée des effets du THC, négatifs (troubles mnésiques) et positifs (antinociceptifs). C’est ce que suggère une étude parue dans Plos Biology. Réalisée sur des souris, l’étude met en évidence le rôle des hétéromères formés par l’interaction physique entre les récepteurs 5-HT 2A et les récepteurs cannabinoïdes CB1R, mécanisme neurobiologique à l’origine des réponses antagonistes induites par le THC. En effet, sur des souris mutantes privées des récepteurs 5-HT 2A, l’effet amnésique du THC disparaissait tandis que perdurait son effet analgésique, résultats permettant d’envisager une dissociation des propriétés bénéfiques du THC de ses effets cognitifs indésirables.
Source : Xavier Viñals, Estefanía Moreno, Laurence Lanfumey , Arnau Cordomí, Antoni Pastor, Rafael de La Torre, Paola Gasperini, Gemma Navarro, Lesley A. Howell, Leonardo Pardo, Carmen Lluís, Enric I. Canela, Peter J. McCormick, Rafael Maldonado, Patricia Robledo, "Cognitive impairment induced by delta9- tetrahydrocannabinol occurs through heteromers between cannabinoid CB1 and serotonin 5-HT2A receptors", Plos Biology
ADDICTION AU FEMININ
Consommation d’alcool et grossesse
Une enquête sur les données de prévalence des consommations d’alcool pendant la grossesse issues de 12 cohortes basées en Irlande, au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande (n=17 244 femmes) révèle une forte prévalence des consommations d’alcool pendant la grossesse (entre 20 et 80 % en Irlande) atteignant 40 % et plus au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande avec des données préoccupantes également quant aux épisodes ponctuels d’alcoolisations excessives, suggérant une faible adhésion aux messages de santé publique et aux recommandations en vigueur dans ces pays qui préconisent soit l’abstinence (Irlande, Australie, Nouvelle-Zélande) et 1 à 2 unités d’alcool une à deux fois (Royaume-Uni). Cette prévalence élevée s’observe tout groupe social confondu, l’usage de tabac ayant été identifié comme le seul indicateur fiable d’une consommation d’alcool associée quel que soit le pays ou la cohorte examinés.
Source : Linda M O'Keeffe, Patricia M Kearney, Fergus P McCarthy, Ali S Khashan, Richard A Greene, Robyn A North, Lucilla Poston, Lesley M E McCowan, Philip N Baker, Gus A Dekker, James J Walker, Rennae Taylor, Louise C Kenny, "Prevalence and predictors of alcohol use during pregnancy: findings from international multicentre cohort studies"
BMJ 2015;5:e006323 doi:10.1136/bmjopen-2014-006323
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