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17 février 2014

Près de 200 abonnés pour ce deuxième numéro !

Partant du constat que la littérature en lien avec les questions d'addictions est mal relayée et diffusée en France, le RESPADD, l'IPPSA et la Fédération Addiction vous proposent la lettre "Actualités des addictions". Outil de veille à destination de tous les professionnels intéressés par la question, son objectif est d'informer sur l'actualité de la recherche et des politiques publiques dans le champ des addictions. Il compte déjà près de 200 abonnés, un grand merci à vous !

Afin de mieux suivre l'actualité abondante sur nos thématiques, nous vous proposons deux numéros par mois au lieu d'un seul. Bonne lecture !

 

POLITIQUES DES DROGUES

Fin de la guerre à la drogue : l’audace uruguayenne

Le Monde diplomatique consacre une double page aux signaux annonçant la fin de « la guerre à la drogue » sur la scène internationale (« Vers la fin de la guerre à la drogue ») et revient sur les raisons qui ont conduit l’Uruguay à proposer un marché réglementé du cannabis (« Pourquoi l’Uruguay légalise le cannabis »).
Pour mettre fin à « la sauvagerie », c’est en ces termes qu’est présentée cette décision du chef de l’état, José Mujica, rendue concrète par l’adoption d’une loi autorisant la culture du cannabis sur le territoire national et sa vente aux adultes en pharmacies. Le Mexique et ses carnages en sont le triste témoignage : la guerre contre la drogue a montré les limites voire l’absurdité de l’approche prohibitionniste et son cortège de corruption et de criminalité. Bien qu’elle n’ait pas recueilli les suffrages de la majorité des uruguayens, celle légalisation participe à la reconnaissance de plus en plus suivie du principe de réduction des risques pour lequel les enjeux de santé publique importent plus que la réduction des consommations.

Source : Le Monde diplomatique, « Pourquoi l’Uruguay légalise le cannabis » (Johann Hari) et « Vers la fin de la guerre à la drogue » (François Polet), n° 719, Février 2014, pp.18-19

Voir aussi l’article sur le site du Guardian « The US war on drugs and its legacy in Latin America »  à propos des coûts humains et financiers de la politique de démantèlement des cartels de drogues en Amérique latine menée par les Etats-Unis, ses conséquences, les nombreuses résistances qu’elle suscite aujourd’hui et les signes d’une évolution et d’un assouplissement dans l’approche des drogues, y compris aux Etats-Unis.

Source : The Guardian, 3 Février 2014, « The US war on drugs and its legacy in Latin America »  
Auteurs : David Huey in Bogotá

 

« Guerre à la drogue » : une catastrophe écologique inédite

La revue Science porte un regard critique sur les conséquences de la guerre contre la drogue à visée prohibitionniste menée par les Etats-Unis. Ce sont l’intensification des trafics et la déforestation qui interpellent les auteurs de cet article. Si la disparition des forêts du corridor biologique mésoaméricain était jusqu’alors attribuée à la faiblesse des gouvernements, à des régimes conflictuels, à une pauvreté endémique, au changement climatique ou à encore l’expansion de l’agrobusiness, le trafic de drogues constitue à lui seul une nouvelle menace participant à l’intensification de cette déforestation. Les raisons d’un tel phénomène ? Les forêts disparaissent au profit de circuits de trafic de drogues clandestins. Le trafic fragilise des frontières gouvernementales déjà affaiblies en y immisçant drogues et important flux d’argent. Des « narco-domaines » (« narco-estates ») prospèrent qui transforment les forêts en espaces de plantations gérés par des organisations de trafiquants.

Source : Science 31 January 2014: Vol. 343 no. 6170 pp. 489-490, « Drug Policy as Conservation Policy: Narco-Deforestation »
Auteurs : Kendra McSweeney, Erik A. Nielsen, Matthew J. Taylor, David J. Wrathall, Zoe Pearson,Ophelia Wang,Spencer T. Plumb
DOI : 10.1126/science.1244082

VU D’AILLEURS

Alcool et mort prématurée en Russie

La Russie se distingue sur la scène internationale par un taux extraordinaire de morts prématurées. Bien que la consommation de spiritueux y ait baissé sensiblement depuis 2005, elle demeure cependant très importante. Parmi les facteurs invoqués : une consommation importante d’alcools forts, dont la vodka.
Une large enquête prospective parue dans le Lancet vient confirmer cette association entre mortalité et consommation d’alcool, suggérée déjà par plusieurs études (études rétrospectives, autopsies, évaluations nationales), à partir du suivi prospectif d’une cohorte de consommateurs actifs ayant inclus 151 811 adultes. Parmi les données saillantes de cette enquête, on notera également la prévalence du tabagisme chez les grands consommateurs d’alcool fort.
Pour aller plus loin dans l’exploration des causes de mortalité par classes d’âges et par pays : http://www.mortality-trends.org/ (site réalisé par l’un des auteurs de l’étude)

Source : The Lancet, 30 janvier 2014,  « Alcohol and mortality in Russia: prospective observational study of 151 000 adults »
Article in Press: Corrected Proof
Auteurs : David Zaridze, Sarah Lewington, Alexander Boroda, Ghislaine Scélo, Rostislav Karpov, Alexander Lazarev, Irina Konobeevskaya, Vladimir Igitov, Tatiyana Terechova, Paolo Boffetta, Paul Sherliker, Xiangling Kong, Gary Whitlock, Jillian Boreham, Paul Brennan, and Richard Peto
PII : S0140-6736(13)62247-3.
DOI : 10.1016/S0140-6736(13)62247-3

PREVENTION DES RISQUES

Tout niveau de consommation d’alcool est préjudiciable au volant

Une enquête réalisée à partir des données officielles et exhaustives d’accidentologie sur une période allant de 1994 à 2011 aux Etats-Unis vient démontrer qu’il n’existe pas de combinaison sans danger entre alcool et conduite, la consommation d’alcool constituant un sur-risque d’accident de la route quel que soit le volume consommé.

Source : Injury prevention, 7 janvier 2014, "Official blame for drivers with very low blood alcohol content: there is no safe combination of drinking and driving"
Auteurs : Phillips DP, Sousa AL, Moshfegh RT.
DOI : 10.1136/injuryprev-2013-040925

 

Consommations d’alcool à risques chez le jeune adolescent : quels profils de personnalité, quels motifs ?

Une étude réalisée auprès d’un échantillon de 3053 adolescents âgés de 13 à 15 ans au Pays-Bas, à partir d’une modélisation en équations structurelles, a pu déterminer l’incidence de la personnalité de ces jeunes adolescents (anxiété, pensées négatives, impulsivité, recherche de sensations) sur les motifs de consommations d’alcool, eux-mêmes liés à leurs recours à l’alcool. Reproduction du comportement des pairs, recherche d’épanouissement et intérêt social sont les motifs de consommation les plus répandus chez ces jeunes consommateurs. Cependant, si ces motifs sont relativement les mêmes entre les sexes et jouent un rôle similaire dans la médiation entre la personnalité de l’adolescent et sa consommation d’alcool, pour les épisodes d’alcoolisation excessive « binge drinking », le schéma varie en fonction des sexes : les filles y s’y adonneront plus par « mimétisme » tandis que les garçons le feront dans une perspective d’ « épanouissement » (enhancement motives). Par ailleurs, les auteurs n’ont pas observé de corrélation statistique particulière entre propension à l’anxiété et motifs de consommations d’alcool.

Source : Drug Alcohol Dependence, 1 décembre 2013 1;133(2):571-9.
Lammers J, Kuntsche E, Engels RC, Wiers RW, Kleinjan M, « Mediational relations of substance use risk profiles, alcohol-related outcomes, and drinking motives among young adolescents in the Netherlands »
DOI : 10.1016/j.drugalcdep.2013.07.030.

Boissons énergisantes et usages de substances psychoactives

Une analyse de corrélation par auto-questionnaires réalisée auprès d’un échantillon représentatif d’étudiants américains scolarisés dans le secondaire vient contribuer à la mise en évidence d’une association forte entre la consommation de boissons énergisantes et l’usage de substances psychoactives (tabac, alcool, amphétamines, marijuana). Si une relation de causalité entre ces deux comportements n’a pas été établie (données transversales et auto-déclaratives), les données recueillies confirment cependant un usage très répandu des boissons énergisantes auprès de ces jeunes, corrélé à un sur-risque de consommation de substances psychoactives, d’où la nécessité, dans une perspective de prévention, d’informer les jeunes populations des effets de la caféine contenue dans ces boissons sur les troubles liés à l’usage de substances.

Source : Journal of Addiction Medicine : Janvier/février 2014 - Volume 8 - p 6-13, « Energy Drinks, Soft Drinks, and Substance Use Among United States Secondary School Students »
Auteurs : Terry-McElrath, Yvonne M. MSA; O'Malley, Patrick M. PhD; Johnston, Lloyd D. PhD
DOI : 10.1097/01.ADM.0000435322.07020.53

EPIDEMIO

Consommation excessive d’alcool et déclin cognitif

Une étude récente publiée dans la revue Neurology, réalisée sur une cohorte de fonctionnaires anglais constituée par 5054 hommes et 2099 femmes âgés de 56 ans en moyenne (entre 44 et 69 ans) et suivis sur une période allant de 1997 à 2009, a recherché l’incidence de la consommation d’alcool, selon le sexe et les volumes consommés, sur un possible déclin des facultés cognitives.
Parmi les résultats observés, une corrélation statistiquement significative lie consommation excessive d’alcool et accélération du déclin cognitif chez l’homme d’âge moyen.

Source : Neurology, 15 janvier 2014, « Alcohol consumption and cognitive decline in early old age »
Séverine Sabia, PhD, Alexis Elbaz, MD, PhD, Annie Britton, PhD, Steven Bell, PhD, Aline Dugravot, MSc, Martin Shipley, MSc, Mika Kivimaki, PhD, Archana Singh-Manoux, PhD

 

FONDAMENTAL

Alcool et cancer : la piste de l’acétaldéhyde

Pour élucider de nouveaux liens entre sensibilité génétique et cancer, une équipe de recherche a interrogé la fonction des gènes BRCA2 et PALB2 connus pour leur implication dans la réparation des lésions de l’ADN et constituant un facteur de prédisposition héréditaire à certains cancers (seins, ovaires) lors d’une exposition à l’acétaldéhyde, produit du métabolisme de l'éthanol. Les résultats observés suggèrent que la mutation de ces gènes rendrait  les individus plus vulnérables aux effets toxiques et carcinogènes de l’éthanol et attirent l’attention sur l’importance de cette variation génétique dans l’étiologie de certains cancers.

Source : American journal of pathology 184 (1): 260, « Hypersensitivities for Acetaldehyde and Other Agents among Cancer Cells Null for Clinically Relevant Fanconi Anemia Genes »
Auteurs : Soma Ghosh, Surojit Sur, Sashidhar R. Yerram, Carlo Rago, Anil K. Bhunia, M. Zulfiquer Hossain, Bogdan C. Paun, Yunzhao R. Ren, Christine A. Iacobuzio-Donahue, Nilofer A. Azad, Scott E. Kern

DOI : 10.1016/j.ajpath.2013.09.023
 

Cartographie cérébrale de la prise de risque

Une étude menée par une équipe de chercheurs de l’Université du Texas et parue dans la revue PNAS, explore les régions neuronales activées lors d’un processus décisionnel pouvant conduire à une prise de risque. Réalisée à partir de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, cette étude a pu mettre en évidence, sur un large échantillon d’individus sains, l’implication des réseaux neuronaux du contrôle cognitif dans la prise de décision. Comme ces réseaux sont fortement activés au moment de la prise de décision, la prise de risque pourrait ainsi s'avérer être en partie issue d’un dysfonctionnement de ce système de contrôle par inhibition. Ainsi, identifier les facteurs extérieurs susceptibles de fragiliser les aires cérébrales du contrôle (pression du groupe des pairs, le manque de sommeil…) pourrait s’avérer pertinent dans l’élaboration de stratégies préventives, y compris pour la prévention des comportements à risques liés aux usages de substances.

Source : Proceedings of the National Academy of Science of the United States of America, PNAS 2014 ; 3 février , 2014, « Predicting risky choices from brain activity patterns »
Auteurs : Sarah M. Helfinstein, Tom Schonberg, Eliza Congdon, Katherine H. Karlsgodt, Jeanette A. Mumford, Fred W. Sabb, Tyrone D. Cannon, Edythe D. London, Robert M. Bilder, and Russell A. Poldrack
DOI : 10.1073/pnas.1321728111

TABAGISME

Le paquet neutre favoriserait un changement des comportements à l’égard du tabac

Le plain packaging (« paquet neutre standardisé ») constituerait pour les Australiens un motif d’arrêt du tabac. C’est ce que révèle une enquête réalisée en population générale ayant enregistré le nombre d’appels émis chaque semaine vers la ligne téléphonique d’aide à l’arrêt du tabac Quitline depuis le 1er octobre 2012. Le succès de ce dispositif (+78% d’appels la semaine de l’adoption du paquet neutre), comparable à celui de l’introduction d’avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes en 2006  sur le nombre d’appels pour une aide au sevrage tabagique, l’emporterait par son impact dans la durée.

Source : The Medical Journal of Australia, 2014; 200 (1): 29-32., « Association between tobacco plain packaging and Quitline calls: a population-based, interrupted time-series analysis »
Jane M Young, Ingrid Stacey, Timothy A Dobbins, Sally Dunlop, Anita L Dessaix and David C
DOI : 10.5694/mja13.11070


 


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