POLITIQUE DES DROGUES
Colorado : de l’or vert aux bud-tonnières
La ville de Denver ne manque pas de créativité dès lors qu’il s’agit de cannabis. Si vous êtes amateurs, laissez-vous tenter à votre arrivée à l’aéroport, en toute légalité, par une petite infusion à base d’inflorescences de cannabis, faites un tour en pick-up pot-friendly jusqu’à votre hôtel "bud and breakfast" en passant par un centre de dispensation de cannabis. Pourquoi pas ensuite opter pour une séance de massages à l’huile de chanvre ou pour un cours de pâtisserie à la résine de cannabis, puis un diner cosy de sushis au cannabis ou fait maison, avec des produits du marché des détaillants du « Green Friday », inflorescences de cannabis aux bud-tonnières ou pour les plus studieux, des cours en ligne pour créer sa propre entreprise cannabis-friendly.
Source : Annie Burns-Pieper, "15 bizarre facts W5 learned researching legalized weed in Colorado", CTV News, 12 février 2015
VU D'AILLEURS
Mésusage de méthamphétamines en Iran
En Iran, la prévalence des situations de mésusage des méthamphétamines est en croissance constante. Les personnes touchées sont le plus souvent les salariés qui cumulent plusieurs emplois pour assurer des ressources suffisantes à leur foyer ou encore les étudiants qui souhaitent maximiser leurs chances de réussite aux concours. La situation géopolitique de l’Iran et sa proximité avec l’Afghanistan, grand exportateur de drogues, peuvent expliquer cette prévalence malgré un dispositif légal extrêmement répressif, les trafiquants risquant la peine de mort. Le développement de centres d’hébergement et de traitement pour les personnes dépendantes contribue cependant à faire évoluer le regard des autorités. Jusqu’alors sceptiques quant à la pertinence d’approches autres que punitives, celles-ci envisagent aujourd’hui l’accompagnement et la prise en charge comme des solutions alternatives efficaces. Par ailleurs, devant l’ampleur du phénomène et l’augmentation croissante des usagers, l’Iran a intensifié ses campagnes de sensibilisation grand public.
Source : Ali Akbar Dareini, "Methamphetamine abuse a rising public health threat in Iran", CTV News, 12 février 2015
Le tabagisme féminin, reflet des inégalités sociales en Inde ?
La prévalence tabagique en Inde a considérablement augmenté chez les femmes entre 2004 et 2009 tandis qu’elle diminuait chez les hommes, d’après les résultats d’une méta-analyse des données de cinq enquêtes représentatives réalisées sur le territoire ces vingt dernières années parue dans le South Asian Journal of Cancer. Cités dans le cadre d’un commentaire de cette étude publié sur le site du British Medical Journal, les auteurs de cette méta-analyse y perçoivent une tendance déroutante (« disturbing trend ») et identifient l’environnement et le capital socio-économique comme autant de facteurs explicatifs de cette prévalence différentielle du tabagisme féminin en fonction des régions : celle-ci étant plus faible voire quasi inexistante dans les villes les plus riches et plus importante chez les femmes présentant un plus faible niveau d’éducation.
Source : Travasso C, "Smoking prevalence among Indian women doubled in five years, study finds.", British Medical Journal, 8 décembre 2014;349:g7512.
doi: 10.1136/bmj.g7512.
Pour consulter la méta-analyse : Goel S, Tripathy JP, Singh RJ, Lal P. "Smoking trends among women in India: analysis of nationally representative surveys (1993-2009)." South Asian Journal of Cancer 2014 ; 3:200-2.
PREVENTION DES RISQUES
Méthamphétamines et neuroplasticité chez l’adolescent
L’adolescence constitue une période critique du développement du cerveau caractérisée par une dynamique de réorganisation synaptique et de myélinisation. On la présente aussi comme une période particulièrement vulnérable aux dommages liés à l’usage de drogues et aux comportements addictifs. Explorant les mécanismes neurobiologiques de cette vulnérabilité, des chercheurs sud-coréens ont observé des modifications neuroanatomiques chez l’adolescent et l’adulte, en contexte d’usage chronique de méthamphétamines. Obtenus par neuroimagerie auprès d’un échantillon de 111 adolescents (51 usagers de méthamphétamine et 60 individus contrôles) et de 114 adultes (54 usagers de méthamphétamine et 60 individus contrôles), les résultats de cette étude évoquent des lésions et altérations spécifiques à l’adolescent usager dont une densité moindre de la substance grise et des troubles des fonctions exécutives plus marqués.
Source : Lyoo IK, Yoon S, Kim TS, Lim SM, Choi Y, Kim JE, Hwang J, Jeong HS, Cho HB, Chung YA, Renshaw PF., "Predisposition to and effects of methamphetamine use on the adolescent brain.", Molecular Psychiatry, 2015 10 février 2015 doi: 10.1038/mp.2014.191.
EPIDEMIOLOGIE
Plus de décès attribuables au tabac aux Etats-Unis
La surmortalité attribuable au tabagisme apparaîtrait dans les rapports officiels américains comme sensiblement en-deçà de ce qu’elle est dans les faits. Ce sont les conclusions d’une méta-analyse des données issues de 5 grandes cohortes américaines constituées de 421 378 hommes et 532 651 femmes âgés de 55 ans et plus suivis entre 2000 et 2011. Ainsi, parmi les décès imputables au tabagisme, il conviendrait d’ajouter, selon les auteurs, les décès par insuffisance rénale (risque relatif : 2.0 ; 95% intervalle de confiance [IC], 1.7 à 2.3), par ischémie intestinale (risque relatif, 6.0; 95% IC, 4.5 à 8.1), liés à des troubles de l’hypertension (risque relatif : 2.4 ; 95 % IC, 1.9 à 3.0),à des infections (risque relatif, 2.3 ; 95 % IC, 2.0 à 2.7), à divers troubles respiratoires (risque relatif : 2.0; 95 % IC, 1.6 à 2.4) , au cancer du sein (risque relatif : 1.3 ; 95% IC, 1.2 à 1.5) et au cancer de la prostate (risque relatif : 1.4 ; 95 % IC, 1.2 à 1.7).
Source : Brian D. Carter, Christian C. Abnet, Diane Feskanich, Neal D. Freedman, Patricia Hartge, Cora E. Lewis, Judith K. Ockene, Ross L. Prentice, Frank E. Speizer, Michael J. Thun, Eric J. Jacobs, "Smoking and mortality - Beyond established causes", N Engl J Med 2015; 372:631-640, February 12, 2015
DOI: 10.1056/NEJMsa1407211
SANTE PUBLIQUE
Ethnographie du RPIB en officine
Une enquête britannique réalisée auprès de pharmaciens et de clients d’officine conforte la légitimité du pharmacien comme acteur de santé publique, à travers l’exemple du repérage précoce des conduites à risque liées à la consommation d’alcool et l’intervention brève. En s’appuyant sur l’observation et l’analyse multicritère des pratiques professionnelles au sein de 5 officines, l’étude entend souligner l’intérêt de ce type d’interventions en officine, tout en attirant l’attention sur les difficultés rencontrées dans leur mise en œuvre et la pertinence d’un dispositif d’évaluation des pratiques des professionnels ad hoc (« feedback model ») dans une perspective d’amélioration et de standardisation des services.
Source : Mackridge AJ, Krska J, Stokes EC, Heim Drttitor, "Towards improving service delivery in screening and intervention services in community pharmacies: a case study of an alcohol IBA service.", Journal of Public Health, 16 février 2015
INSOLITE
Les cigarettiers friands de désinformation
Le paquet neutre n’aurait guère d’effet sur le tabagisme des jeunes australiens. C’est ce que soutiennent deux enquêtes publiées par l’université de Zurich, à la méthodologie douteuse et grevées de nombreuses erreurs d’analyse, financées par l’industrie du tabac et ayant échappé à une évaluation par les pairs (!). Relayées largement et malencontreusement par la presse, puis débusquées par des experts en santé publique et vivement mises en cause sur le site du British Medical Journal, exhortant à ce qu’elles soient retirées de la publication, ces études bancales ne feraient que pointer le manque de données exploitables actuellement, sur les effets réels de ces politiques.
Source : Jamie Doward, "Row over Marlboro-funded research that undermined plain cigarette packs", The Guardian, 14 février 2014
>> Consulter le commentaire sur ces deux études sur le site BMJ
RECHERCHE FONDAMENTALE
Une nouvelle cible thérapeutique pour réduire les effets de l’alcoolo-dépendance
L’alcool est la substance psychoactive la plus consommée dans le monde et son usage chronique constitue un facteur majeur dans l’étiologie de séquelles pathologiques comme les cardiomyopathies alcooliques ou la cirrhose du foie. Identifié dans le cadre d’une étude préliminaire sur des souris parue dans la revue PNAS, le gène RGS6, du fait de son implication comme régulateur de la biodisponibilité de la dopamine en contexte de consommation d’alcool, pourrait constituer une cible thérapeutique privilégiée pour réduire les effets du manque (« alcohol cravings ») tout en préservant le cœur et le foie des dommages induits par la consommation d’alcool.
Source : Stewart A, Maity B, Anderegg SP, Allamargot C, Yang J, Fisher RA., "Regulator of G protein signaling 6 is a critical mediator of both reward-related behavioral and pathological responses to alcohol.", PNAS, 2 février 2015
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