Pour en finir avec la guerre contre les drogues

Le Wall Street Journal consacre une tribune à « la guerre contre la drogue » menée par les Etats-Unis, aux dépenses massives qu’elle suscite estimées à 40 milliards par an, aux profits qu’elle a engendrés pour les trafiquants et aux nombreuses morts évitables qu’elle a entraînées notamment au Mexique où près de 60 000 décès sont imputables à la campagne antidrogue en vigueur depuis 2006.
La décriminalisation des drogues constitue un premier pas nécessaire pour sortir de cet état de fait, seule capable de réguler le marché des drogues et de limiter le risque addictif, d’après les auteurs, sociologues économistes.

Source : Gary S. Becker, Kevin M. Murphy, "Have we lost the war on drugs?", Wall Street Journal

Un nombre grandissant de consommateurs d’héroïne au Pakistan

Un article paru dans The Diplomat s’inquiète de l’augmentation du nombre d’usagers de drogues par voie intraveineuse (UDVI) au Pakistan et de ses conséquences en termes de santé publique. Dans la région du nord-ouest du Pakistan, 11% des habitants consomment des substances illicites dont l’héroïne qui constitue la substance la plus consommée. Tandis que le nombre d’usagers était estimé à 6,7 millions en 2013, près de 4,25 millions seraient dépendants et seulement 30 000 parmi ceux-ci auraient bénéficié en 2013 d’un programme de réhabilitation et de traitements adaptés. En 2007, le nombre d’UDVI était estimé à 90 000, aujourd’hui il atteint les 500 000. Une enquête récente a révélé que 73 % des UDVI dont 1/3 d’entre eux sont porteurs du VIH disent avoir échangé leurs seringues, les risques encourus étant méconnus par la population faute de campagne de prévention et de réseaux de soins dédiés aux usagers.

Sources :
* JT Quigley, "Pakistan: the most heroin-addicted country in the world", The Diplomat, 1er avril 2014
* "Controversial trial at NHS clinics to offer cash for drug addicts who stay clean", The Independant

 

Baisse du tabagisme en Grande Bretagne : une victoire pour la santé publique

La prévalence du tabagisme en Grande-Bretagne est passée en-deçà du seuil des 20 % pour la première fois depuis 80 ans. En 2013, 22 167 adultes ont été interrogés quant à leur consommation de tabac et la prévalence du tabagisme s’élevait 19,3 %. Peu fréquent au début du 20e siècle, le tabagisme avait très fortement augmenté jusqu’en 1962 qui avait vu la publication du rapport "Smoking and health" et une prévalence du tabagisme record de 70 % chez les hommes et de 40 % chez les femmes.

Source : Jamie Brown, Robert West, "Smoking prevalence in England is below 20 % for the first time in 80 years", British Medical Journal
BMJ 2014;348:g1378

Décès sous opioïdes : une révolution s’impose

Prenons acte des progrès réalisés en termes de prévention et de prise en charge de l’épidémie de sida pour agir sur les risques liés à la consommation d’opioïdes. C’est ce que propose un article paru dans l’American Journal of Medicine constatant que si le nombre de décès liés aux opioïdes et la nature des victimes autorisent un parallélisme avec les cas de décès liés au sida, il est temps que la réponse de santé publique aux risques liés à la consommation d’opioïdes soit à la hauteur de celle dont bénéficient les personnes à risque de contracter le VIH. Tandis que les analgésiques opioïdes sur prescription tuent aujourd’hui plus d’individus que l’héroïne et la cocaïne aux USA, une régulation des prescriptions s’impose, le décès par overdose pouvant résulter parfois d’une transition insensible entre prescription médicale et usage récréatif. Parmi les ressources disponibles pour agir dès maintenant : la distribution de naloxone et l’éducation thérapeutique du patient, la réévaluation des critères diagnostics de prescription de traitements pharmacologiques contre la douleur et en guise de stratégie globale : la sensibilisation et l’éducation des soignants, la diffusion d’outils thérapeutiques, l’implication des patients dans la stratégie de soins comme pour le VIH avec l’espoir de bénéfices collatéraux inédits.

Source : Wakeman SE, Green TC, Rich JD.American, "From Documenting Death to Comprehensive Care: Applying Lessons from the HIV/AIDS Epidemic to Addiction.", Journal of Medicine, 9 janvier 2014
doi: 10.1016/j.amjmed.2013.12.018

 

Des incitations financières pour encourager le dépistage de l’hépatite B

Original et audacieux, le modèle de prévention imaginé par des experts en santé publique de trois grandes universités londoniennes issu d’une étude parue dans le Lancet, s’impose dans le paysage de la prévention. Les résultats de cette étude randomisée contrôlée réalisée auprès de 210 individus suggèrent en effet que l’introduction d’une incitation financière à l’attention des patients sous traitement de substitution aux opiacés les encouragerait de façon significative à procéder à leur vaccination contre l’hépatite B puisqu’ils seraient près de 5 fois plus nombreux à suivre le programme de vaccination dans les 28 jours que les patients auxquels aucune incitation financière n’a été proposée (45 % contre 9 % IC 12•1, 95% CI 3•7—39•9; p<0•0001).

Source : "Use of contingency management incentives to improve completion of hepatitis B vaccination in people undergoing treatment for heroin dependence: a cluster randomised trial", The Lancet, 9 avril 2014
Auteurs : Tim Weaver, Nicola Metrebian, Jennifer Hellier, Prof Stephen Pilling, Vikki Charles, Nicholas Little, Dilkushi Poovendran, Luke Mitcheson, Frank Ryan, Owen Bowden-Jones, John Dunn, Anthony Glasper, Emily Finch, John Strang

 

Hommes et femmes inégaux face à l’alcool

Les femmes seraient plus particulièrement vulnérables aux conséquences de l’alcool en termes de mortalité comparées aux hommes surtout en contexte de fortes consommations. C’est ce que suggère une méta-analyse des données épidémiologiques existantes issues d’une sélection de 22 études (2 424 964 individus et 123 878 décès) parue dans le Journal of Women's Health ayant examiné les causes de décès par sexe en fonction du statut de buveur ou non-buveur.

Source : "Effect of Drinking on All-Cause Mortality in Women Compared with Men: A Meta-Analysis", Journal of Women's Health
Auteurs : Wang Chao, Xue Haifeng, Wang Qianqian, Hao Yongchen, Li Dianjiang, Gu Dongfeng, Huang Jianfeng
DOI :10.1089/jwh.2013.4414.

Dexamphétamine et pathologies psychiatriques : les ruses de la génétique

Une étude parue dans la revue PNAS suggère qu’une sensibilité génétique aux effets euphorisants de la dexamphétamine pourrait être inversement corrélée à une prédisposition génétique à la schizophrénie et au trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Plus spécifiquement, les allèles associés à une réponse euphorique accrue à la dexamphétamine sont liés à un risque minoré de survenue d’une schizophrénie ou d’un TDAH. Ces données viennent conforter l’hypothèse encore débattue selon laquelle le système dopaminergique serait impliqué dans ces deux pathologies. Enfin, cette étude montre l’importance de l’analyse secondaire des résultats des associations génomiques et illustre la façon dont une exposition à un agent pharmacologique peut mettre en évidence une prédisposition génétique qui prendra la forme d’une pathologie psychiatrique chez l’individu.

Source : "Genetic variations associated with euphorigenic effects of d-amphetamine is associated with diminished risk for schizophrenia and attention deficit hyperactivity disorder", PNAS, 5 mars 2014
Auteurs : Amy B. Hart, Eric R. Gamazon, Barbara E. Engelhardt, Pamela Sklar, Anna K. Kähler, Christina M. Hultman, Patrick F. Sullivan, Benjamin M. Neale, Stephen V. Faraon, Psychiatric Genomics Consortium: ADHD Subgroup, Harriet de Wit, Nancy J. Cox and Abraham A. Palmer

 

Mécanismes de l’altération du contrôle inhibiteur chez les usagers de substances psychoactives

Le contrôle inhibiteur constitue un processus cérébral majeur dont le dysfonctionnement semble caractéristique chez les usagers de substances psychoactives (SPA). Cependant les mécanismes et la nature de ce dysfonctionnement du contrôle cognitif selon la durée d’exposition aux SPA sont mal connus. Afin de déterminer la nature de cette altération, une étude réalisée sur un échantillon de 158 usagers occasionnels et 47 individus contrôle a exploré par l’imagerie fonctionnelle les activations neuronales observables dans ces deux groupes lors d’une tâche exécutive (la Stop Signal Task). Une activation neuronale plus faible dans plusieurs aires cérébrales (régions du noyau caudé, du cortex préfrontal, du cortex cingulaire antérieur et de l’insula) a pu être observée avec réduction des afférences inhibitrices, suggérant une mobilisation moindre des ressources du traitement cérébral de l’information.

Source : "Altered neural processing of the need to stop in young adults at risk for stimulant dependence", The Journal of Neuroscience, 26 Mars 2014, 34(13): 4567-4580
Auteurs : Katia M. Harlé, Pradeep Shenoy, Jennifer L. Stewart, Susan F. Tapert, Angela J. Yu, and Martin P. Paulus
DOI : 10.1523/JNEUROSCI.2297-13.2014

 

Une lésion de l’insula préserve les individus des altérations psychologiques associées au jeu excessif

Une étude parue dans la revue PNAS a voulu étudier les régions du cerveau impliquées dans les altérations du jugement provoquées par le jeu en examinant les comportements de patients porteurs d’une lésion cérébrale dans 3 régions spécifiques au regard de celui de patients lésés dans d’autres régions du cerveau ou d’individus sains par une série de tests simulant une situation de jeu. Les résultats ont pu mettre en évidence que les désordres psychologiques induits par le jeu (illusion du joueur « gambler fallacy », sur-motivation à jouer malgré les pertes…) sont sensiblement atténuées chez les patients atteints d’une lésion du cortex insulaire, données permettant de formuler l’hypothèse selon laquelle une sur-mobilisation du circuit insulaire pourrait sous-tendre les désordres cognitifs liés au jeu excessif.

Source : "Damage to insula abolishes cognitive distortions during simulated gambling", PNAS
Auteurs : Luke Clarka, Bettina Studera, Joel Bruss, Daniel Tranel, Antoine Bechara